CHAPITRE III – Pathologie gynécologique
Plan :
• Item 300 – Tumeurs du col utérin, tumeur du corps utérin
• Item 306 – Tumeurs de l’ovaire
• Item 312 – Tumeurs du sein
Item 300 – Tumeurs du col utérin, tumeur du corps utérin
Auteur : Pierre-Alexandre Just
I. Tumeurs du col utérin
II. Tumeurs de l’endomètre
Hiérarchisation des connaissances – Tableau 1
I. Tumeurs du col utérin
A. Prérequis : histologie du col utérin
Le col utérin comporte deux parties :
• l’exocol fait protrusion dans le vagin et est revêtu par un épithélium malpighien non kératinisé (à l’état normal), en continuité avec l’épithélium malpighien recouvrant la cavité vaginale. Cet épithélium malpighien comporte une couche de cellules basales, qui prolifèrent de façon contrôlée pour assurer le renouvellement de l’épithélium. Elles maturent dans les couches plus superficielles qui sont dénommées « couches épineuses ». Il n’y a pas, à l’état normal, de couche granuleuse ni de couche cornée dans le revêtement malpighien exocervical car il s’agit d’un épithélium malpighien non kératinisé. ;
• l’endocol constitue le canal endocervical, mettant en communication la cavité vaginale avec la cavité utérine (endométriale). Il est revêtu par un épithélium unistratifié mucosécrétant. Des glandes revêtues par le même type d’épithélium sont présentes sous le revêtement de surface.
Les épithéliums de l’endocol et de l’exocol s’affrontent le long de la zone de jonction pavimento-cylindrique (Figure. 7.1). Elle est le siège préférentiel des infections par HPV (human papillomavirus) qui peuvent conduire à des tumeurs du col utérin. La zone de jonction pavimento-cylindrique est généralement située à hauteur de l’orifice externe du col (ostium). Chez certaines patientes, la zone de jonction pavimento-cylindrique peut être située sur l’exocol (ectropion) ou plus haut dans l’endocol (entropion).
B. Histoire naturelle de l’infection par HPV et carcinogenèse malpighienne multi-étapes
• le tabagisme ;
• l’immunodépression (notamment celle liée à une infection par VIH – virus de l’immunodéficience humaine) ;
• le contexte socio-économique défavorisé.
C. Modalités du dépistage
Les modalités du dépistage sont détaillées dans les recommandations de l’HAS (Haute autorité de santé) de 2019.
• Entre 25 et 29 ans, le dépistage est cytologique : tous les 3 ans après deux frottis normaux réalisés à 1 an d’intervalle.
• Entre 30 et 65 ans, le dépistage est virologique : test virologique 3 ans après le dernier examen cytologique normal ou dès 30 ans en l’absence de cytologie, puis tous les 5 ans.
En fonction des résultats du FCU, différentes prises en charge sont proposées (Figure. 7.5), suivant les recommandations de l’HAS. Par exemple, en cas de frottis LIEBG (Figure. 7.6) ou LIEHG (Figure. 7.7), il est recommandé la réalisation d’une colposcopie avec biopsies (pour examen histologique) si des anomalies sont visibles.
Attention ! Si la patiente est symptomatique (ex : saignements post-coïtaux, col induré à l’examen clinique), la notion de dépistage ne s’applique pas ! On rentre alors dans le cadre du diagnostic positif d’une éventuelle lésion du col utérin et la prise en charge diagnostique est différente : consultation de gynécologie et biopsies ciblées.
D. Carcinogenèse glandulaire
E. Autres tumeurs
F. Facteurs histopronostiques
• le stade pTNM (évalué sur pièce d’hystérectomie), calqué sur le score FIGO (Fédération internationale de gynécologie et d’obstétrique) ;
• la présence d’emboles lymphatiques carcinomateux.
Dans les stades précoces, le stade TNM/FIGO prend en compte la mesure de la profondeur d’infiltration du chorion cervical. Pour les stades plus avancés, le stade TNM/FIGO prend en compte l’extension aux organes de voisinage (paramètres, vessie, rectum) et la présence de métastases ganglionnaires lymphatiques dans les ganglions lymphatiques.
II. Tumeurs de l’endomètre
A. Prérequis : histologie de l’endomètre
Le corps utérin comporte, de dedans en dehors (Figure. 7.9) :
• une cavité centrale, appelée cavité utérine ou cavité endométriale, revêtue d’une muqueuse appelée endomètre ;
• une épaisse couche de tissu musculaire lisse, appelée myomètre ;
• une séreuse, en continuité avec le mésothélium du péritoine pelvien.
L’endomètre est une muqueuse comportant (Figure 7.10) :
• un revêtement endométrial de surface, bordant la cavité utérine ;
• des glandes épithéliales ;
• un chorion, appelé chorion cytogène.
De la puberté à la ménopause, l’endomètre connaît des modifications cycliques de son aspect histologique, en lien avec le cycle menstruel et les sécrétions hormonales d’origine ovarienne.
Après les règles (le début des règles définissant le J1 du cycle menstruel), l’endomètre, sous l’action des œstrogènes, prolifère (à la fois les glandes endométriales et le chorion cytogène) : c’est la phase proliférative, qui reconstitue l’endomètre après son élimination par les règles. L’ovulation (classiquement à J14) correspond au début de la phase sécrétoire : sous l’action combinée des œstrogènes et de la progestérone, les glandes endométriales et le chorion cytogène maturent afin de constituer un milieu favorable à l’implantation d’un ovule fécondé. À la fin de la phase sécrétoire, l’arrêt de la production ovarienne d’hormones conduit aux règles, c’est-à-dire à l’élimination de presque toute l’épaisseur de l’endomètre (sauf la couche basale – basalis – qui permet la régénération de la muqueuse endométriale au cycle suivant).
B. Facteurs de risque
Ces facteurs de risque d’hyperœstrogénie relative incluent :
• une puberté précoce ;
• une ménopause tardive ;
• la pauciparité ;
• le syndrome des ovaires polykystiques ;
• un traitement hormonal de la ménopause par œstrogènes seuls ;
• un traitement par tamoxifène (dans le cadre d’un cancer du sein).
Par ailleurs, le tissu adipeux joue un rôle important dans le métabolisme des hormones sexuelles féminines. Ainsi, constituent également des facteurs de risque importants :
• l’obésité, notamment androïde ;
• l’hypertension artérielle ;
• le diabète de type 2.
Ces derniers facteurs sont de plus en plus observés compte tenu de l’évolution des habitudes de vie en France, pour le développement d’un carcinome endométrial. Ils conduisent également à un état d’hyperœstrogénie relative. Enfin, le syndrome de Lynch est également un facteur de risque important.
C. Principaux types histologiques des carcinomes endométriaux
D. Carcinogenèse multi-étapes du carcinome endométrioïde
E. Facteurs histopronostiques
Il existe plusieurs facteurs histologiques d’impact pronostique :
• le type histologique. À stade égal, les carcinomes endométrioïdes ont un meilleur pronostic que les carcinomes séreux ;
• le stade pTNM (évalué sur pièce d’hystérectomie), sur lequel est calqué celui de la FIGO :
– pour les stades précoces, l’appréciation de la profondeur d’infiltration du myomètre (< ou > 50 % de l’épaisseur du myomètre) est cruciale,
– pour les stades plus avancés, l’atteinte du col utérin et des ganglions lymphatiques pelviens ou lomboaortiques est importante à apprécier.
Pour les carcinomes endométrioïdes, se surajoutent d’autres facteurs histopronostiques :
• le grade tumoral (apprécié par le pourcentage de la surface tumorale occupée par des zones solides – et non glandulaires) ;
• la présence d’emboles lymphatiques carcinomateux en nombre significatif ;
• la présence des certaines anomalies génétiques : à stade égal, les mutations du gène POLE sont associées à un meilleur pronostic et les mutations du gène TP53 sont associées à un moins bon pronostic.
Points clés
• Les tumeurs malignes endométriales les plus fréquentes sont les adénocarcinomes, surtout les adénocarcinomes de type endométrioïde (80 % des cas).
• Il existe une classification distinguant les carcinomes de type I (adénocarcinome endométrioïde de bas grade) et de type II (carcinome séreux, carcinome à cellules claires et carcinosarcome).
• Environ 3 à 5 % des carcinomes de l’endomètre surviennent dans le cadre d’un syndrome de Lynch.
Item 306 – Tumeurs de l’ovaire
Auteur : Pierre-Alexandre Just
I. Prérequis : rappels histologiques
II. Principales familles des tumeurs de l’ovaire
III. Principales tumeurs épithéliales de l’ovaire
IV. Histogenèse des tumeurs épithéliales de l’ovaire
V. Cancer de l’ovaire : épidémiologie, modes d’extension, facteurs de risque et génétique
VI. Dialogue entre chirurgien et anatomopathologiste devant une tumeur ovarienne
VII. Le problème des métastases
Hiérarchisation des connaissances Tableau 2
I. Prérequis : rappels histologiques
Les ovaires (Figure. 8.1) sont des organes assurant :
• la sécrétion des œstrogènes et de la progestérone, et dans une moindre mesure de la testostérone ;
• la maturation des gamètes.
Ils sont recouverts par le revêtement mésothélial péritonéal, appelé alors le revêtement cœlomique. La partie externe est appelée cortex ; elle comporte, au sein du stroma ovarien, les follicules. À partir des ménarches (premières règles), les follicules (jusqu’alors au stade primordial) maturent, pour partie, à chaque cycle menstruel. Ils évoluent vers les stades primaire, secondaire, tertiaire, jusqu’au follicule antral dit « follicule de de Graff ». L’évolution des follicules s’accompagne par le développement en surface des cellules qui les entourent : les cellules de la granulosa (cellules appartenant au groupe des cordons sexuels). Ces cellules sécrètent des œstrogènes en première partie du cycle menstruel, assurant la prolifération de l’endomètre. Autour des cellules de la granulosa, il existe des cellules spécialisées du stroma ovarien (thèque interne et thèque externe) qui accompagnent également le développement folliculaire. Lors de l’ovulation, survenant habituellement à J14, le follicule de Graff se rompt à la surface ovarienne, avec expulsion de l’ovocyte (qui est capté par la trompe), déclenchant la deuxième partie du cycle menstruel. Les cellules de la granulosa et de la thèque interne se transforment pour devenir de très grande taille, emplies de lutéine (substance stéroïde de couleur jaune, base de la synthèse des hormones stéroïdiennes). La sécrétion de progestérone par les cellules folliculaires débute, assurant la maturation (et non la prolifération) des cellules endométriales. C’est le stade du corps jaune. En l’absence d’implantation utérine d’un ovocyte fécondé, le corps jaune régresse pour donner naissance à une cicatrice fibreuse : le corps blanc. Le cycle ovarien et menstruel reprend alors, par définition à partir du 1er jour des règles, déclenchées par la chute de la sécrétion des hormones ovariennes (œstrogènes et progestérone).
II. Principales familles des tumeurs de l’ovaire
• les tumeurs dites « fonctionnelles » ;
• les tumeurs dites « organiques ».
Les tumeurs « fonctionnelles » (Figure. 8.2) sont des lésions kystiques formées à partir des follicules ovariens : kyste folliculaire, corps jaune kystique, etc. Il ne s’agit donc pas d’un véritable processus tumoral qui se définit comme une prolifération cellulaire anormale échappant aux mécanismes de régulation. Le plus souvent, les tumeurs fonctionnelles s’observent chez la patiente en âge de procréer et disparaissent spontanément lors d’un contrôle échographique. Les tumeurs « organiques » regroupent un très grand nombre d’entités (Tableau 8.1). Macroscopiquement, elles peuvent être kystiques (uni ou multikystiques), solides, ou à la fois kystiques et solides. Dans certaines formes, il peut exister des végétations à l’intérieur des kystes (végétations internes) ou à la surface de l’ovaire (végétations externes).
Les tumeurs « organiques » sont classées en trois grandes familles :
• les tumeurs germinales. Elles dérivent de l’ovocyte. Elles sont plus fréquentes chez la patiente jeune et les enfants. Il existe des formes bénignes et malignes. Les formes bénignes sont de loin les plus fréquentes, représentées par les tératomes matures (Figure. 8.3) dont fait partie le kyste dermoïde. Cette tumeur est capable de reproduire tous les tissus de l’organisme humain, issus des trois feuillets embryonnaires, sous une forme mature, c’est-à-dire comparable aux tissus observés chez l’adulte.
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III. Principales tumeurs épithéliales de l’ovaire
Les tumeurs épithéliales de l’ovaire sont classées selon deux éléments : le type de cellule épithéliale et le degré de malignité.
• les cellules séreuses : certaine parenté avec les cellules épithéliales tubaires (de la trompe) ;
• les cellules mucineuses : présence d’une vacuole de mucosécrétion dans les cellules ;
• les cellules endométrioïdes : ressemblance avec les cellules épithéliales de l’endomètre ;
• les cellules claires : avec un cytoplasme abondant clarifié ;
• les cellules transitionnelles : ressemblance avec les cellules épithéliales du revêtement urothélial de la vessie.
• tumeurs bénignes. Elles sont appelées sous le terme générique d’adénome. Elles peuvent être kystiques (cystadénome), solides, avec une composante fibreuse abondante (adénofibrome), ou une combinaison des deux (cystadénofibromes) ;
• tumeurs malignes. Elles correspondent à différentes variétés d’adénocarcinomes (cf. Tableau 8.1). Macroscopiquement, elles comportent habituellement une partie solide, avec souvent une partie kystique. Comme toute tumeur maligne, elles peuvent s’accompagner de métastases. Les métastases sont généralement péritonéales, par dissémination directe des cellules tumorales dans la cavité péritonéale (pelvis, puis abdomen).
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• les adénomes séreux (cystadénomes, adénofibromes, etc.), pouvant être bilatéraux (Figure. 8.4) ;
• le cystadénome mucineux, toujours unilatéral, souvent de grande taille (pouvant dépasser 30 cm de grand axe, Figure. 8.5) ;
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• l’adénofibrome endométrioïde ;
• l’adénome à cellules claires est exceptionnel.
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• puis, par ordre de fréquence décroissant : la tumeur endométrioïde borderline, la tumeur à cellules transitionnelles borderline (tumeur de Brenner borderline), et la tumeur à cellules claires borderline (exceptionnelle).
• l’adénocarcinome séreux de haut grade, de loin le plus fréquent (Figure. 8.6) ;
• l’adénocarcinome endométrioïde ;
• l’adénocarcinome à cellules claires ;
• l’adénocarcinome séreux de bas grade ;
• l’adénocarcinome mucineux.
Une lésion épithéliale doit être classée à part : l’endométriome. Il s’agit de la forme la plus fréquente de l’endométriose ovarienne, sous la forme d’un kyste revêtu de cellules endométrioïdes reposant sur du chorion cytogène (comme dans la muqueuse endométriale normale). Il ne s’agit donc pas à proprement parler d’une tumeur vraie.
IV. Histogenèse des tumeurs épithéliales de l’ovaire
Plusieurs modèles d’histogenèse sont proposés (résumés dans le Tableau 8.2) :
• modèle du précurseur tubaire : ce modèle est proposé pour les carcinomes séreux de haut grade. Une lésion précurseur, appelée carcinome in situ tubaire (STIC), se développe sur l’épithélium de la trompe, généralement sur le pavillon ou l’ampoule. Les cellules tumorales desquament et se greffent sur l’ovaire, donnant naissance à la masse tumorale ovarienne ;
• modèle « ovulatoire » ou théorie « de la cicatrisation » : ce modèle est proposé pour les tumeurs séreuses bénignes, les tumeurs séreuses borderline et le carcinome séreux de bas grade. À chaque ovulation, la libération de l’ovocyte par le follicule se traduit par une brèche du revêtement cœlomique de l’ovaire (couche de cellules mésothéliales recouvrant l’ovaire). Lors de la réparation de cette brèche, une invagination du revêtement cœlomique se produit, et s’accompagne parfois de la formation de petits kystes, appelés kystes corticaux par inclusion. Par un phénomène de métaplasie, le revêtement de ces kystes se transforme de cellules mésothéliales en cellules de type tubaire. Alternativement, et plus probablement, la brèche serait en fait réparée par un accolement de l’épithélium d’une frange pavillonnaire tubaire ; cet épithélium se détachant du pavillon, il se greffe à la surface de l’ovaire et donne naissance aux kystes corticaux par inclusion. Ces derniers seraient à l’origine des tumeurs séreuses bénignes (cystadénomes séreux, adénofibromes séreux, etc.). Selon un modèle de tumorigenèse multi-étapes, ces tumeurs séreuses bénignes peuvent évoluer vers une tumeur séreuse borderline, puis vers le carcinome ovarien séreux de bas grade ;
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• modèle du reflux menstruel : ce modèle est proposé pour les tumeurs endométrioïdes : endométriome, adénome endométrioïde, tumeur borderline endométrioïde et carcinome endométrioïde. Lors des règles, une partie des cellules de l’endomètre, au lieu d’être éliminée par le vagin, subit un reflux vers les trompes et se greffe sur les ovaires ;
• pour les carcinomes à cellules claires, l’existence d’une association statistique avec l’endométriose fait suggérer un développement à partir d’un endométriome. Le schéma d’un tumorigenèse multi-étapes est moins bien accepté car les formes borderline sont exceptionnelles et les formes bénignes quasi inexistantes ;
• pour les tumeurs à cellules transitionnelles, les tumeurs bénignes (tumeurs de Brenner bénignes) pourraient tirer leur origine de reliquats embryonnaires wolfiens présents dans le ligament large et le long de la trompe (îlots de Walthard). Les beaucoup plus rares tumeurs de Brenner borderline et malignes pourraient se développer à partir de tumeurs de Brenner bénignes selon un modèle de tumorigenèse multi-étapes.
V. Cancer de l’ovaire : épidémiologie, modes d’extension, facteurs de risque et génétique
D’un point de vue épidémiologique, en 2020, le cancer de l’ovaire (tous types histologiques) :
• représente le 8e cancer le plus fréquent chez la femme en France ;
• représente le 3e cancer gynécologique pelvien (= hors sein), derrière les cancers de l’endomètre et du col utérin ;
• représente la 8e cause de mortalité par cancer chez la femme ;
• présente une grande variation dans l’âge d’apparition mais la plupart des tumeurs sont diagnostiquées après la ménopause (âge moyen de 65 ans) (sauf les tumeurs germinales malignes qui sont plutôt observées chez l’enfant et la femme jeune).
Il s’agit d’un cancer de mauvais pronostic : tous stades confondus, la survie globale à 5 ans est de 44 %. Si elle est de 85 % pour les stades I (limités à l’ovaire), elle est inférieure à 20 % pour les stades avancés.
Le cancer de l’ovaire est caractérisé par un mode de dissémination qui se fait préférentiellement par voie péritonéale, par ensemencement direct des cellules tumorales ovariennes sur le péritoine pelvien, puis abdominal, selon le flux naturel du liquide péritonéal et aboutit à un tableau de carcinose péritonéale. Les métastases par voies lymphatique (métastases ganglionnaires lymphatiques pelviennes et lomboaortiques) et hématogène (poumon, foie, etc.) sont plus rares. Ce tropisme péritonéal marqué explique le fait que le diagnostic se fait généralement à un stade avancé, avec carcinose péritonéale et ascite.
• l’obésité ;
• l’hyperœstrogénie relative : ménarches précoces, ménopause tardive, nulliparité, traitement hormonal de la ménopause avec œstrogènes seuls, etc. ;
• âge > 50 ans ;
• infertilité et traitements inducteurs de l’ovulation (notamment stimulation par clomifène) ;
• exposition à l’amiante ;
• tabagisme.
La présence d’antécédents familiaux de cancers du sein et de l’ovaire constitue également un facteur de risque, car orientant vers un syndrome de prédisposition familiale BRCA.
À l’inverse, les facteurs protecteurs, avec une implication statistique également relativement faible, sont essentiellement représentés par les facteurs limitant l’hyperœstrogénie : contraception orale, grossesse, allaitement, etc. Les antécédents de salpingectomie bilatérale constituent également un facteur protecteur ; en effet, la salpingectomie bilatérale n’autorise plus le développement de la principale lésion précurseur du carcinome séreux de haut grade ovarien, qui est le STIC. Dix à 15 % des cancers de l’ovaire surviennent dans un contexte de syndrome familial de prédisposition au cancer. Cette relative grande fréquence justifie la réalisation d’une consultation d’oncogénétique devant toute tumeur maligne de l’ovaire. Le syndrome BRCA, lié à des mutations germinales des gènes BRCA1 et BRCA2, est le syndrome génétique le plus souvent incriminé. Il prédispose aux cancers du sein et de l’ovaire. Le risque de développer un cancer de l’ovaire est plus important pour les femmes porteuses d’une mutation du gène BRAC1 que chez celles porteuses d’une mutation du gène BRCA2. Les tumeurs ovariennes apparaissant chez ces patientes ont la particularité d’être en général de meilleur pronostic car plus sensibles à la chimiothérapie.
VI. Dialogue entre chirurgien et anatomopathologiste devant une tumeur ovarienne organique
A. Hypothèse clinicoradiologique d’une tumeur bénigne
B. Hypothèse clinicoradiologique d’une tumeur borderline
C. Tumeur a priori maligne
Il est généralement proposé une cœlioscopie première. Celle-ci permet :
• d’apprécier l’étendue de la carcinose le cas échéant ;
• d’apprécier la résécabilité tumorale complète ;
• de réaliser des biopsies péritonéales afin d’avoir un diagnostic histologique (en cas de carcinose péritonéale). Les biopsies péritonéales doivent être multiples, portant sur des foyers de carcinose péritonéale différents. Sur ces biopsies, le diagnostic anatomopathologique doit comporter le type histologique précis (qui confirme habituellement, la malignité et le caractère primitif tubo-ovarien). Des analyses moléculaires, en particulier la recherche de mutation de BRCA, sont généralement entreprises sur ce matériel, s’il est assez abondant, afin de guider les options thérapeutiques. Ceci souligne la nécessité de biopsies multiples pour avoir un matériel tumoral assez abondant permettant les analyses anatomopathologiques et moléculaires.
D. Tumeur et éventuelles lésions de carcinose paraissant entièrement extirpables lors de l’évaluation cœlioscopique
Si la tumeur et la carcinose ne paraissent pas entièrement résécables lors de l’évaluation cœlioscopique, une chimiothérapie première à base de sels de platine est proposée (chimiothérapie néoadjuvante). Une réévaluation est faite par biologie (évolution du CA125 [cancer antigen 125]), imagerie ± cœlioscopie après 3 à 4 cycles de chimiothérapie. Si la maladie a répondu à la chimiothérapie et devient résécable, il est procédé à l’exérèse chirurgicale de toutes les localisations tumorales, dans l’idéal sans résidu tumoral post-chirurgical (chirurgie d’intervalle). Le traitement est complété par 2 à 3 cures de chimiothérapie (chimiothérapie de clôture) et, le plus souvent, par un traitement de maintenance.
VII. Le problème des métastases
• d’origine gynécologique basse : cancers de l’endomètre et du col surtout ;
• d’origine digestive : tumeurs de l’appendice et cancers du côlon, du rectum, de l’estomac, du pancréas, etc. ;
• d’origine autre : cancers du sein, du poumon, etc.
Le clinicien et l’anatomopathologiste doivent systématiquement penser à cette hypothèse, plus particulièrement en cas d’antécédents personnels de cancer non ovarien ou d’atteinte ovarienne bilatérale.
Points clés
• Les tumeurs de l’ovaire peuvent être :
– « fonctionnelles » = lésion kystique, disparaissant habituellement lors d’un contrôle échographique ;
– « organiques » = tumeurs vraies.
• Les tumeurs organiques appartiennent à trois grandes familles :
– les tumeurs germinales, essentiellement chez la femme jeune, le plus souvent bénignes (tératome mature) ;
– les tumeurs des cordons sexuels et du stroma ovarien, qui surviennent habituellement autour ou après la ménopause, et qui peuvent être bénignes (fibrome, fibrothécome, etc.) ou malignes (tumeur de la granulosa adulte) ;
– les tumeurs épithéliales, les plus fréquentes.
• Les tumeurs épithéliales de l’ovaire peuvent être :
– bénignes (cystadénome, etc.) ;
– borderline (degré de malignité intermédiaire entre bénin et malin) ;
• malignes (adénocarcinomes), avec un mode de dissémination essentiellement péritonéal (carcinose). L’adénocarcinome séreux de haut grade est la plus fréquente des tumeurs malignes de l’ovaire. Dans trois quarts des cas, il se présente au diagnostic avec une carcinose péritonéale. Il s’agit d’une tumeur de mauvais pronostic. Il existe souvent une lésion précurseur sur la trompe (STIC).
• Le diagnostic des tumeurs organiques des ovaires doit être histologique (et non pas seulement cytologique).
• Dix à 15 % des tumeurs épithéliales malignes de l’ovaire surviennent dans le cadre d’un syndrome familial de prédisposition au cancer : essentiellement le syndrome BRCA, prédisposant au cancer du sein et des ovaires. Une consultation d’oncogénétique est donc nécessaire devant un cancer de l’ovaire.
• Dix pour cent des tumeurs épithéliales malignes des ovaires sont des métastases d’origine extra-ovarienne.
Item 312 – Tumeurs du sein
Auteur : David Buob
I. Prérequis
II. Lésions bénignes du sein
III. Épidémiologie du cancer du sein
IV. Carcinome in situ
V. Caractéristiques anatomopathologiques des carcinomes infiltrants
VI. Stratégie diagnostique
VII. Facteurs théranostiques et pronostiques anatomopathologiques
VIII. Chirurgie et examen anatomopathologique
Hiérarchisation des connaissances – Tableau 3
I. Prérequis
A. Rappel d’anatomie
Le sein comporte d’avant en arrière : le tégument (peau), le tissu conjonctif sous-cutané renfermant la glande mammaire, puis un tissu conjonctif lâche permettant au corps mammaire de glisser en arrière sur le plan musculaire du grand pectoral. Au niveau du mamelon, s’ouvre une dizaine de pores galactophoriques. La glande mammaire correspond à un système ramifié de canaux galactophores. En arrière du mamelon, ces galactophores se divisent en canaux de plus en plus étroits, jusqu’à l’unité terminale ductolobulaire (UTDL). L’UTDL comporte les canaux extra et intralobulaires qui se terminent par les acini qui sont fonctionnels surtout pendant la grossesse et la lactation (Figure. 9.1).
B. Rappel histologique
Les canaux et les acini ont deux couches cellulaires (interne et externe) délimitées par une membrane basale. La couche externe renferme des cellules myoépithéliales (contractiles). La couche interne est faite de cellules épithéliales mucosécrétantes. Le tissu conjonctif, dénommé tissu palléal, renferme des vaisseaux sanguins lymphatiques et du collagène.
II. Lésions bénignes du sein
• les adénofibromes.
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La mastopathie fibrokystique du sein est une maladie fréquente chez des patientes en périménopause, révélée par des anomalies radiologiques.
• des kystes (dilatation de canaux galactophores) ;
• une hyperplasie épithéliale canalaire ;
• une adénose (prolifération du nombre de lobules) ;
• des cicatrices radiaires (lésion stellaire à centre fibreux).
III. Épidémiologie du cancer du sein
• l’incidence est de 58 400 nouveaux cas par an en France (2018) ;
• il touche la femme d’âge ≥ 50 ans dans 80 % des cas ;
• le taux de survie globale à 5 ans est de 88 % ;
• c’est la première cause de décès par cancer chez la femme devant le cancer du poumon ;
• il peut être favorisé par des mutations des gènes BRCA1 et BRCA2.
IV. Carcinome in situ
V. Caractéristiques anatomopathologiques des carcinomes infiltrants
A. Principaux types histologiques d’adénocarcinomes
• Carcinome infiltrant de type non spécifique (ou carcinome canalaire infiltrant) : ≈ 90 % des cancers du sein.
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• Autres types : carcinomes tubuleux, mucineux, micropapillaires, adénoïdes kystiques, etc.
Il existe d’autres tumeurs malignes que les adénocarcinomes primitifs, mais elles sont exceptionnelles (lymphome, sarcome, métastase mammaire).
B. Grade histopronostique
• si score total = 3, 4 ou 5 : grade I ;
• si score total = 6 ou 7 : grade II ;
• si score total = 8 ou 9 : grade III.
VI. Stratégie diagnostique
S’il s’agit d’une lésion formant une masse (nodule palpable ou image stellaire à l’imagerie), une biopsie au pistolet est pratiquée avec une aiguille de calibre standard de 14G (dite « microbiopsie » par opposition aux macrobiopsies, cf. infra). En cas de lésion ne se traduisant pas par une masse accessible à une microbiopsie (microcalcifications essentiellement), des macrobiopsies avec aiguille de 10G sont réalisées.
• de confirmer la nature maligne de la lésion biopsiée ;
• en cas de cancer, de préciser s’il s’agit d’un cancer in situ ou d’un cancer infiltrant ;
• en cas de cancer infiltrant :
– de préciser le type histologique (non spécifique ou lobulaire),
– de préciser le grade de Elston et Ellis,
– de déterminer le statut des facteurs prédictifs et théranostiques des cancers du sein : récepteurs hormonaux, oncogène HER2, marqueur de prolifération Ki-67 (cf. infra).
En cas d’anomalie lors de l’échographie axillaire, un prélèvement ganglionnaire est réalisé par cytoponction ou biopsie à la recherche d’un envahissement métastatique. La cytoponction, réalisée à l’aide d’une aiguille de plus petit calibre, a l’avantage d’être un geste moins invasif que la biopsie.
VII. Facteurs théranostiques et pronostiques anatomopathologiques
A. Récepteurs hormonaux d’œstrogènes et de progestérone
Pour tout cancer du sein infiltrant, le pourcentage de cellules tumorales exprimant les récepteurs hormonaux (récepteurs des œstrogènes, RO, et récepteurs de la progestérone, RP) est évalué par immunohistochimie (Figure. 9.5). Un traitement hormonal peut être instauré si plus de 10 % des cellules tumorales expriment les RO.
B. Oncogène HER2 (HER2-neu ou c-erbB2)
En cas de score 2+, l’immunohistochimie est considérée comme ambiguë et doit être complétée par une étude par hybridation in situ recherchant une amplification du gène ; si une amplification du gène est mise en évidence par hybridation in situ (Figure. 9.7), un traitement anti-HER2 est justifié.
C. Autres facteurs pronostiques
• la présence et le nombre de ganglions métastatiques +++ ;
• la taille de la tumeur ;
• le sous-type histologique (bon pronostic : tubuleux, mucineux) ;
• le grade histopronostique d’Elston et Ellis ;
• l’index de prolifération (évalué par le Ki-67) ;
•
VIII. Chirurgie et examen anatomopathologique
A. Exérèse chirurgicale de la lésion mammaire
Il peut s’agir d’une tumorectomie (résection partielle du sein) ou d’une mastectomie (ablation de toute la glande mammaire).
• type histologique : carcinome infiltrant : NOS (not otherwise specified)/lobulaire/autres (suivant la classification de l’OMS en vigueur) ;
• grade histopronostique d’Elston et Ellis ;
• statut des récepteurs hormonaux : RO et RP ;
• statut HER2.
Les autres informations importantes apportées par l’examen des pièces opératoires avec cancer infiltrant sont les suivantes :
• taille histologique de la tumeur maligne infiltrante et pT de la classification TNM ;
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• appréciation de la réponse histologique en cas d’éventuel traitement néoadjuvant ;
• précision de la présence d’un éventuel carcinome canalaire in situ associé.
B. Ganglion sentinelle
Le cancer du sein évolue d’abord localement, puis s’étend dans les ganglions lymphatiques drainant les seins (chaîne axillaire en particulier) avant de disséminer ensuite dans l’organisme sous la forme de métastases viscérales (osseuses, hépatiques et pulmonaires principalement). Le ganglion sentinelle est le premier relais ganglionnaire de drainage de la glande mammaire. Un ganglion sentinelle métastatique est prédictif de l’envahissement du reste du curage axillaire : dans cette situation, un curage axillaire est donc discuté en RCP ; si le ganglion n’est pas métastatique, on ne réalise habituellement pas de curage, ce qui évite d’exposer les patientes aux morbidités associées au curage axillaire.
Repérage du ganglion sentinelle :
La veille de l’intervention, un colloïde marqué au technétium est injecté aux quatre coins de la tumeur (péritumorale) si la tumeur est palpable. Si la tumeur est non palpable, l’injection est périaréolaire du quadrant où se situe la tumeur. Lors de l’intervention, le chirurgien injecte selon la même méthode le bleu patenté avant l’incision cutanée. Puis il recherche le ou les ganglions sentinelles marqués au technétium grâce à une sonde et/ou colorés par le bleu patenté, en réalise l’exérèse et les adresse au laboratoire d’anatomie pathologique avec demande éventuelle d’un examen extemporané (Figure. 9.9).
Points clés
• Les cancers infiltrants du sein sont quasiment toujours des adénocarcinomes.
• Il est indispensable de préciser le type histologique d’adénocarcinome, le grade histopronostique d’Elston et Ellis et les facteurs pronostiques et/ou prédictifs thérapeutiques (RO, RP, HER2).
• L’envahissement du ganglion sentinelle est prédictif de l’envahissement du curage axillaire. Si ce dernier est métastatique, un curage axillaire est discuté en RCP.