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VIII. Dermatologie

CHAPITRE VIII – DERMATOLOGIE

Auteur : Nicolas Ortonne

Plan :

•   Item 112 – Dermatose bulleuse touchant la peau et/ou les muqueuses externes

•   Item 194 – Lupus systémique. Syndrome des antiphospholipides (SAPL)

•   Item 302 – Tumeurs cutanées épithéliales et mélaniques

Item 112 – Dermatose bulleuse touchant la peau et/ou les muqueuses externes

I.   Prérequis

II.   Notions cliniques

III.   Principes des méthodes diagnostiques

IV.   Caractéristiques cliniques, variants et aspects anatomopathologiques des dermatoses bulleuses auto-immunes

V.   Aspects anatomopathologiques des dermatoses bulleuses non auto-immunes les plus fréquentes

Hiérarchisation des connaissances – Tableau 1 

I. Prérequis

L’histologie de la peau normale est illustrée figure 27.1.

On distingue :

•   l’épiderme : épithélium malpighien kératinisant (pavimenteux, stratifié) ;

•   le derme (tissu conjonctif situé sous l’épiderme duquel il est séparé par la membrane basale).

Dans l’épiderme, il y a aussi des cellules pigmentées (mélanocytes) et quelques cellules de Langerhans. Au sein de l’épiderme, on distingue de la profondeur à la superficie : la couche basale (cellules au contact de la membrane basale), le corps muqueux, la couche granuleuse, et enfin la couche cornée (kératine).

II. Notions cliniques

Bulle : collection liquidienne cutanée superficielle à contenu clair supérieure à 5 mm.

En dessous de cette taille, la terminologie dermatologique utilise plutôt le terme de vésicule. Les bulles cutanées doivent faire rechercher une dermatose bulleuse auto-immune, où un autoanticorps dirigé contre une structure de jonction de la peau est produit, et vient se déposer dans la peau et causer des lésions bulleuses. Les dermatoses bulleuses auto-immunes sont la pemphigoïde bulleuse (la plus fréquente) et le pemphigus vulgaire.

Il existe des variantes de pemphigoïde, en particulier la pemphigoïde de la grossesse et la pemphigoïde cicatricielle qui sont beaucoup plus rares.

L’épidermolyse bulleuse acquise est une autre maladie bulleuse par atteinte de la jonction dermoépidermique, plus rare que la pemphigoïde, avec une fréquence particulière dans certains pays (Afrique). D’autres dermatoses bulleuses existent, telles que la dermatite herpétiforme et la dermatose à IgA linéaires (la plus fréquente chez l’enfant).

Le retentissement de ces maladies dépend en grande partie de l’extension cutanée des lésions, qui se chiffre habituellement en pourcentage de la surface corporelle atteinte, de l’étendue de l’atteinte muqueuse et de son retentissement notamment oculaire ou sur l’alimentation en cas de lésions buccales et ORL étendues, et de la fragilité de l’hôte (âge, pathologies associées).

D’autres pathologies peuvent être la cause de bulles cutanées :

•   les toxidermies, en particulier le syndrome de Lyell (groupe des nécrolyses épidermiques toxiques) ;

•   l’érythème polymorphe bulleux post-infectieux ;

•   les agents externes (chaleur, brûlures, coup de soleil, frottement, etc.) ;

•   les infections staphylococciques avec production de toxines exfoliantes (épidermolyse staphylococcique) ;

•    les maladies métaboliques : porphyrie cutanée tardive, diabète (bullose diabétique) et hypertension ;

•   les épidermolyses bulleuses d’origine génétique.

Les principales caractéristiques cliniques sont résumées dans le tableau 27.1.

III. Principes des méthodes diagnostiques

Le diagnostic repose sur l’association de critères :

•   cliniques ;

•   immunologiques : recherche d’autoanticorps dans le sérum ;

•   anatomopathologiques, nécessitant :

–   un prélèvement biopsique sur une bulle récente ou intacte, en périphérie du décollement, fixé par le formol pour examen histologique classique,

–   un prélèvement biopsique en peau péribulleuse, sans fixation, transporté immédiatement vers le laboratoire d’anatomie pathologique pour congélation, puis examen en IF directe.

Remarque : La recherche d’autoanticorps dans le sérum se fait par IF indirecte, mais ce n’est pas un examen anatomopathologique (utilisation de coupes de peau normale animale dont les caractéristiques moléculaires sont similaires à la peau humaine pour rechercher les autoanticorps dans le sérum du patient) (figure. 27.2).

A. Examen histologique

Il s’agit d’un examen histologique standard après fixation par le formol.

B. Examen d’immunofluorescence cutanée directe sur une biopsie cutanée congelée

L’IF cutanée directe a pour objectif la détection des immunoglobulines (autoanticorps) et du complément déposés dans la peau (figure. 27.2). Cet examen a un intérêt dans trois situations :

•   le lupus : détection d’une bande lupique;

•   les maladies bulleuses auto-immunes ;

•   les vascularites cutanées pour la détection de complexes immuns dans les parois des capillaires dermiques.

La technique d’IF directe cutanée comporte les séquences suivantes :

•   réalisation de coupes du tissu congelé (peau) au cryostat déposées sur une lame ;

•   dépôt sur la coupe d’un anticorps spécifique (anti-IgG ou anti-C3 par exemple) couplé à un fluorochrome (FITC [fluorescein isothiocyanate], de couleur verte le plus souvent), puis rinçage éliminant les anticorps qui ne se sont pas fixés sur leur cible ;

•   examen de la lame avec un microscope à fluorescence : visualisation de la fluorescence là où il y a des dépôts d’IgG ou de C3 ;

•   interprétation du résultat : localisation et nature des dépôts.

Le choix d’un immunomarquage fluorescent sur une coupe congelée s’explique par le fait que l’on souhaite marquer une protéine extracellulaire présente en faible quantité dans le tissu, nécessitant un marquage très sensible sans dénaturation des structures protéiques (autoanticorps : immunoglobuline et complément). L’IF sur tissu congelé est donc la technique de choix pour la mise en évidence des dépôts d’immunoglobulines et de complément ; elle est plus sensible et spécifique que l’immunohistochimie classique faite à partir du tissu fixé par le formol et inclus en paraffine.

IV. Caractéristiques cliniques, variants et aspects anatomopathologiques des dermatoses bulleuses auto-immunes

Les dermatoses bulleuses auto-immunes sont liées à la production d’autoanticorps dirigés contre des protéines liant les kératinocytes entre eux (desmosomes interkératinocytes) pour les pemphigus ou liant l’épiderme au derme (atteinte de la jonction dermoépidermique, protéines d’ancrage à la membrane basale) pour les pemphigoïdes. Le pemphigus est donc la seule dermatose bulleuse auto-immune avec présence de cellules acantholytiques (= kératinocytes isolés flottant dans la bulle, et qui sont devenus ronds). En cas de dermatose bulleuse non auto-immune, l’examen en IF est négatif.

Le tableau 27.2 donne pour chaque pathologie :

•   la cible de l’autoanticorps produit ;

•   l’aspect histologique (figure 27-4 et figure 27-6);

•   l’aspect en IF directe (figure 27-5 et figure 27-7).

A. Pemphigus vulgaire

Il est dû à des autoanticorps spécifiques dirigés contre la desmogléine 3 (figure. 27.3). La maladie peut être provoquée par une prise médicamenteuse.

Histologiquement, le clivage est intra-épidermique, au-dessus de la couche basale (figure. 27.4).

Il existe des variantes de pemphigus :

•   pemphigus superficiel (foliacé ou séborrhéique). Histologiquement, le clivage se situe sous la couche cornée.

Cette forme de pemphigus est liée à la production d’anticorps anti-desmogléine 1. La présentation de la maladie est purement cutanée, sans atteinte muqueuse, avec prédominance dans les zones séborrhéiques (zones médiofaciales et tronc) ;

•    pemphigus paranéoplasiques

(satellites de lymphomes, maladie de Castleman, ou de cancers solides, etc.) où l’on retrouve en général des autoanticorps ciblant d’autres antigènes du desmosome et de l’hémidesmosome.

B. Pemphigoïde bulleuse

Elle est due à des autoanticorps antimembrane basale (BPAG : bullous pemphigoid antigens, cf. figure. 27.4).

Les anticorps se déposent dans la peau, activent le complément et recrutent des polynucléaires éosinophiles, qui participent probablement à cliver la jonction dermoépidermique en libérant leurs granules toxiques.

Comme pour le pemphigus, il existe des variantes, selon le terrain (pemphigoïde de la grossesse) ou l’évolution des lésions (pemphigoïde cicatricielle).

Avant le développement des bulles, la maladie peut être précédée de lésions eczématiformes ou urticariennes. Il est ainsi recommandé devant tout prurit du sujet âgé, notamment s’il existe des lésions inflammatoires, de pratiquer un examen d’IF cutanée directe.

C. Dermatose à IgA linéaires

Elle peut être considérée comme une variante de pemphigoïde. L’antigène cible est d’ailleurs un fragment du BPAG1, cible de la pemphigoïde. La maladie survient chez des sujets beaucoup plus jeunes, voire des enfants, et volontiers au décours de prises médicamenteuses, classiquement la vancomycine. Elle se manifeste par des bulles sur la racine des membres, se regroupant en rosettes. Dans cette maladie, les autoanticorps sont d’isotype IgA (d’où le nom de la maladie) qui recrutent plutôt des polynucléaires neutrophiles que des éosinophiles dans les lésions cutanées qui sont des bulles à la jonction dermoépidermique.

D. Dermatite herpétiforme

Elle se voit également chez l’enfant et le sujet jeune. Elle ne donne pas de bulles mais plutôt des vésicules très prurigineuses, sur la racine des membres et les fesses. Elle est liée à la production d’anticorps anti-transglutaminase, et s’associe presque constamment à une maladie cœliaque.

V. Aspects anatomopathologiques des dermatoses bulleuses non auto-immunes les plus fréquentes

Le diagnostic différentiel avec les dermatoses bulleuses auto-immunes reposera notamment sur l’absence de dépôts mis en évidence par l’IF cutanée.

A. Toxidermies

Les nécrolyses épidermiques toxiques (syndromes de Stevens-Johnson [SJS] et de Lyell) sont des toxidermies graves qui engagent le pronostic vital et se distinguent l’une de l’autre par l’étendue et la topographie des lésions (atteinte périorificielle dans le SJS). Elles peuvent être induites par n’importe quel médicament.

Certains médicaments sont plus fréquemment en cause (allopurinol, sulfaméthoxazole, antiépileptiques et AINS, notamment). Histologiquement, on observe un épiderme nécrosé sur toute son épaisseur, se décollant du derme superficiel, celui renfermant un infiltrat lymphocytaire. L’IF directe est négative.

L’érythème pigmenté fixe est une toxidermie se traduisant par des lésions cutanées arrondies récidivant sur les mêmes territoires cutanés, après chaque prise de médicaments et laissant souvent une pigmentation résiduelle. Dans certains cas, les lésions sont bulleuses. Le délai de survenue après la prise est inférieur à 48 heures.

Histologiquement, les formes bulleuses montrent des lésions proches de celles des nécrolyses épidermiques toxiques.

B. Érythème polymorphe bulleux

L’érythème polymorphe est une réaction immunologique survenant au décours d’une infection (herpès simplex, mycoplasmes, etc.). La maladie peut être récidivante et causer des lésions bulleuses.

Histologiquement, le centre bulleux de la cocarde montre des aspects proches de celles du SJS et du syndrome de Lyell.

C. Porphyrie cutanée tardive

La porphyrie cutanée tardive est une des formes les plus fréquentes de porphyrie, qui est due à des anomalies dans le métabolisme de l’hémoglobine. Les malades ont une fragilité cutanée et développent des bulles. Histologiquement, ce sont des bulles par décollement complet de l’épiderme, sans réaction inflammatoire, associées à un épaississement des basales des capillaires (mieux visibles sur la coloration par le PAS).

Points clés

•   Les dermatoses bulleuses auto-immunes de la peau sont dues à des autoanticorps reconnaissant des antigènes cutanés.

•   Le diagnostic repose sur l’aspect clinique, la recherche d’autoanticorps dans le sérum (immunofluorescence indirecte) et les examens anatomopathologiques nécessitant :

–   un examen histologique standard à partir d’un prélèvement biopsique sur une bulle récente ou intacte, en périphérie du décollement ;

–   un examen en immunofluorescence directe à partir d’un prélèvement biopsique en peau péribulleuse.

•   La maladie la plus fréquente est la pemphigoïde bulleuse, qui touche les sujets âgés et se caractérise par des bulles sous-épidermiques. L’IF met en évidence les autoanticorps antimembrane basale sous la forme d’un marquage linéaire à la jonction dermoépidermique.

•   Le pemphigus et ses variantes sont responsables de lésions cutanées et muqueuses, avec formation de bulles intra-épidermiques fragiles. L’examen anatomopathologique standard met en évidence une acantholyse et l’IF un aspect en « mailles ».

•   De nombreuses autres maladies dermatologiques peuvent entraîner la formation de bulles : toxidermies (nécrolyse épidermique toxique), maladies métaboliques (porphyrie cutanée tardive), érythème polymorphe post-infectieux, bulles de causes mécaniques, etc. Dans ces cas, l’examen en IF de la biopsie est négatif.

Item 194 – Lupus systémique. Syndrome des antiphospholipides (SAPL)

I.   Généralités – Physiopathologie

II.   Lupus et anatomie pathologique

Hiérarchisation des connaissances – Tableau 2 

I. Généralités – Physiopathologie

Le lupus érythémateux systémique ou lupus érythémateux disséminé est une maladie systémique, auto-immune, spontanément grave, caractérisée par la production d’anticorps antinucléaires dirigés en particulier contre l’ADN natif.

La physiopathologie de la maladie est partiellement connue et multifactorielle. L’analyse des lésions tissulaires indique qu’il existe des phénomènes auto-immuns complexes, faisant intervenir une agression à médiation cellulaire et la production d’autoanticorps (médiation humorale) avec parfois formation de complexes immuns, incluant des cryoglobulines. Il existerait une immunisation contre des constituants de corps apoptotiques cellulaires avec production d’autoanticorps (facteurs antinucléaires). Outre l’agression des tissus par des lymphocytes, les lésions et symptômes seraient dus à l’interaction de ces autoanticorps avec les constituants tissulaires, ou à des complexes immuns circulants activant le complément.

Les atteintes les plus fréquentes sont cutanées, articulaires, rénales, sanguines et neurologiques.

Les critères diagnostiques définis par le Collège des rhumatologues américains (American College of Rheumatology [ACR]) permettent de définir les principales manifestations du lupus érythémateux disséminé. Classiquement, le diagnostic peut être retenu si quatre de ces critères sont réunis :

•   rash malaire ;

•   rash « discoïde » ;

•   photosensibilité ;

•   ulcérations orales ou nasopharyngées ;

•   arthrite non érosive d’au moins deux articulations périphériques ;

•   sérite (pleurésie, péricardite) ;

•   atteinte rénale : protéinurie ≥ 0,5 g/24 h, cylindres ;

•   atteinte neurologique (convulsions ou psychose) ;

•   atteinte hématologique : cytopénie(s) ;

•   titre anormal de facteurs antinucléaires ;

•   anticorps anti-ADN natifs ou anomalies immunologiques.

À côté du lupus érythémateux disséminé, il existe des formes purement cutanées de lupus (lupus érythémateux chronique et panniculite lupique) ou à expression cutanée très prédominante (lupus érythémateux subaigu).

II. Lupus et anatomie pathologique

L’anatomie pathologique joue un rôle important pour :

•   confirmer la nature « lupique » d’une lésion cutanée ;

•   évaluer la nature et le degré évolutif de l’atteinte rénale.

Lésions cutanées du lupus : On distingue les lésions dites spécifiques, ne s’observant qu’au cours du lupus, des lésions non spécifiques, pouvant s’observer au cours d’autres maladies.

1. Prélèvements – Techniques

La biopsie cutanée n’est pas systématique.

Elle peut être utile pour confirmer la nature lupique d’une lésion.

En cas d’indication de biopsie, il faut adresser en anatomie pathologique :

•   un fragment pour examen anatomopathologique classique (histologie sur fragment fixé qui sera inclus en paraffine) ;

•   un fragment sans fixateur pour examen en immunofluorescence directe. Ce prélèvement doit être adressé sans fixateur immédiatement au laboratoire d’anatomie pathologique pour congélation. Sur la feuille de demande d’examen accompagnant les deux prélèvements, doivent être précisés le contexte clinique (suspicion de lupus), la demande d’examen histologique classique et la demande d’examen en immunofluorescence.

Immunofluorescence cutanée directe

Elle a pour objectif de détecter des autoanticorps déposés dans la peau. En dermatologie, cet examen a un intérêt dans trois situations :

•   le lupus : détection d’une bande lupique ;

•   les maladies bulleuses auto-immunes (cf. item 112) ;

•   les vascularites cutanées pour la détection de complexes immuns dans les parois des capillaires dermiques (cf. item 193).

La bande lupique est caractérisée par un dépôt (figure. 28.2) :

•   localisé à la jonction dermoépidermique ;

•   formant une bande granulaire ;

•   constitué d’immunoglobulines (IgG et/ou IgM, ± IgA) et de fractions du complexe d’attaque membranaire du complément (C1q, C3).

Attention ! Il existe d’authentiques lupus sans bande lupique à l’immunofluorescence cutanée directe.

2. Lésions spécifiques

Elles permettent de faire le diagnostic de lupus, cliniquement et/ou histologiquement.

Lupus à expression dermoépidermique : ses caractéristiques sont décrites dans le tableau 28.1 (voir aussi figures 28-1, 28-2, 28-3).

Autres lésions lupiques spécifiques

•    Lupus à expression dermique :

–   lupus « tumidus » ;

–   lupus engelure ;

•   Lupus hypodermique : panniculite lupique.

3. Lésions non spécifiques

Elles ne sont spécifiques du lupus ni cliniquement ni histologiquement. Elles traduisent la présence d’autoanticorps thrombogènes ou capables de former des complexes immuns, phénomène que l’on peut retrouver dans d’autres maladies :

•   atteinte vasculaire inflammatoire : purpura vasculaire, urticaire ;

•   atteinte vasculaire thrombotique, éventuellement dans le cadre d’un syndrome des antiphospholipides (fréquent dans la forme subaiguë et parfois dans la forme aiguë) : livedo, nécroses cutanées.

Points clés

•    Le lupus est une maladie auto-immune qui atteint fréquemment et parfois exclusivement la peau.

•   Il existe trois lésions cutanées spécifiques de la maladie : le lupus aigu, le lupus subaigu et le lupus chronique.

•   Le diagnostic de lupus repose sur un faisceau d’arguments cliniques et biologiques.

•   L’examen d’une biopsie cutanée par immunofluorescence directe est un élément diagnostique dont la positivité est définie par la mise en évidence d’un aspect de « bande lupique ».

Item 302 – Tumeurs cutanées, épithéliales et mélaniques

Hiérarchisation des connaissances – Tableau 3 

Tumeurs cutanées épithéliales

I.   Prérequis

II.   Fréquence et épidémiologie

III.   Types histologiques

IV.   Carcinome basocellulaire

V.   Carcinome épidermoïde cutané et lésions précancéreuses

I. Prérequis

Histologie de la peau normale (avec kératinocytes, mélanocytes, épiderme, derme papillaire, etc.).

II. Fréquence et épidémiologie

Les cancers cutanés sont les cancers les plus fréquents chez l’adulte, en particulier du fait de la forte incidence du carcinome basocellulaire. Quatre-vingt-dix pour cent des cancers cutanés sont des carcinomes (tumeurs épithéliales malignes). Le carcinome basocellulaire est le plus fréquent.

III. Types histologiques

Les deux principaux carcinomes cutanés épithéliaux sont :

•   le carcinome basocellulaire ;

•   le carcinome épidermoïde.

Le tableau 29.1 donne les principales caractéristiques histologiques et évolutives de ces deux carcinomes.

Le tableau 29.2 résume les principales caractéristiques cliniques et les facteurs pronostiques de ces deux cancers.

IV. Carcinome basocellulaire

C’est le plus fréquent des cancers. Il s’agit d’une tumeur exclusivement cutanée survenant en peau saine (pas de lésion précancéreuse).

L’évolution est lente, la malignité locale (métastases exceptionnelles).

La tumeur est le plus souvent sporadique, mais il existe des formes familiales dans le cadre du syndrome de Gorlin (nævomatose basocellulaire) se traduisant par la survenue de très nombreuses tumeurs tout au long de la vie.

Les risques évolutifs sont les suivants : infiltration locorégionale à bas bruit, récidive locale (après traitement), développement d’une autre lésion (lien épidémiologique avec carcinome épidermoïde et mélanome).

A. Aspect histologique

•   Cellules monomorphes, basaloïdes (ressemblent aux cellules de la couche basale de l’épiderme) (figure. 29.1).

•   Disposées en palissades en périphérie des amas tumoraux.

•   Fentes de rétraction entre la tumeur et le stroma.

•   Formes « infiltrantes » ou « sclérodermiformes » : stroma dense et fibreux, limites imprécises (rendant l’exérèse complète plus difficile).

B. Diagnostic et traitement

La prise en charge des carcinomes basocellulaires de mauvais pronostic doit être discutée dans le cadre d’une RCP. Une biopsie préalable au geste d’exérèse peut être faite pour affirmer le diagnostic s’il existe un doute clinique, si le traitement proposé n’est pas chirurgical, pour toutes les formes cliniques de mauvais pronostic ou si le geste chirurgical nécessite une reconstruction importante.

Le compte rendu d’anatomie pathologique doit notamment comporter les éléments suivants :

•   aspect/taille de la lésion ;

•   sous-type histologique (superficiel, nodulaire, infiltrant, sclérodermiforme, métatypique, composite) ;

•   qualité de l’exérèse (limites latérales et profondes) :

–   en tissu tumoral,

–   au ras de la tumeur,

–   en tissu sain (préciser la marge minimale).

Le traitement chirurgical avec exérèse complète de la lésion est le traitement de référence.

V. Carcinome épidermoïde cutané et lésions précancéreuses

Le carcinome épidermoïde cutané est beaucoup moins fréquent que le carcinome basocellulaire.

Il s’apparente morphologiquement aux carcinomes épidermoïdes pouvant se développer dans d’autres organes (VADS, œsophage, poumon, col de l’utérus) mais il a une agressivité inférieure, en partie liée à son développement cutané permettant une détection plus précoce.

Les risques sont l’infiltration, la récidive locale, l’apparition de métastases, le développement d’une autre lésion.

Le carcinome épidermoïde survient souvent en peau lésée (lésion précancéreuse : kératose actinique ou maladie de Bowen), et peut, à la différence du carcinome basocellulaire, toucher les muqueuses.

A. Lésions précancéreuses

1. Kératose actinique

Les lésions sont liées aux UV (peau exposée) et sont isolées ou multiples.

Histologiquement, il s’agit d’une prolifération des cellules basales de l’épiderme qui apparaissent atypiques, tassées les unes contre les autres, avec des mitoses (figure 29.2).

La kératose actinique évolue assez rarement en carcinome épidermoïde et peut régresser spontanément.

2. Carcinome épidermoïde in situ (ex-maladie de Bowen)

Il s’agit d’un carcinome épidermoïde intra-épithélial.

Il se transforme en carcinome épidermoïde infiltrant dans environ 3 à 5 % des cas.

Sur le plan anatomopathologique, l’épiderme est désorganisé et constitué sur toute son épaisseur de kératinocytes atypiques mais qui, par définition, ne franchissent pas la membrane basale (figure 29.3).

3. Leucoplasie

Il s’agit d’une lésion clinique : plaque blanchâtre au niveau des muqueuses.

Histologiquement, elle correspond le plus souvent à une dysplasie épithéliale malpighienne, classée en trois grades (dysplasie légère, modérée, sévère) selon que les atypies nucléaires, la désorganisation architecturale et les mitoses concernent le tiers inférieur, les deux tiers inférieurs ou plus des deux tiers de la hauteur de l’épithélium.

4. Érythroplasie de Queyrat

Il s’agit d’un carcinome épidermoïde in situ, équivalent de la maladie de Bowen au niveau des muqueuses génitales masculines (gland). Elle se transforme en carcinome infiltrant dans environ 10 % des cas.

B. Aspect histologique

L’aspect histologique du carcinome épidermoïde de la peau (figure 29.4) comporte :

•   cellules malpighiennes (kératinocytes) atypiques, disposées en lobules ou en travées ;

•   mitoses ;

•   différenciation kératinisante (globes cornés) ;

•   infiltration/invasion (franchissement de la membrane basale) du derme/de l’hypoderme ;

•   stroma inflammatoire.

Il existe plusieurs sous-types histologiques qui ont une valeur pronostique.

Ainsi, seraient de meilleur pronostic les carcinomes :

•   verruqueux (très bien différenciés, exophytiques), parfois développés sur une ulcération chronique ;

•   à cellules fusiformes ;

•   mixtes basosquameux.

En revanche, seraient de plus mauvais pronostic les formes :

•   acantholytiques (les cellules se détachent les unes des autres) ;

•   adénosquameuses (forme mixte d’adénocarcinome, carcinome épidermoïde) ;

•   desmoplastiques (stroma fibreux abondant).

C. Diagnostic et traitement des carcinomes épidermoïdes cutanés

La prise en charge des carcinomes épidermoïdes cutanés de mauvais pronostic doit être discutée dans le cadre d’une RCP. Une biopsie préalable au geste d’exérèse peut être faite.

La biopsie est recommandée :

•   si le diagnostic clinique est incertain ;

•   si un traitement non chirurgical est envisagé ;

•   pour confirmation diagnostique préopératoire avant une intervention mutilante.

Le compte rendu d’anatomie pathologique doit mentionner tous les éléments permettant de déterminer le pronostic de la tumeur :

•   taille de la tumeur ; facteur de mauvais pronostic > 2 cm ;

•   différenciation (bien/moyennement/peu) ;

•   invasion périnerveuse (oui/non) ;

•   emboles lymphatiques microscopiques (oui/non) ;

•   épaisseur tumorale ; facteur de mauvais pronostic si épaisseur > 3 mm ;

•    sous-type histologique à valeur pronostique (verruqueux, fusiforme, mixte avec basocellulaire, adénosquameux, acantholytique, desmoplasique) ;

•   qualité de l’exérèse :

–   limites latérales : en tissu tumoral, au ras de la tumeur, en tissu sain (préciser la marge minimale),

–   limites profondes : en tissu tumoral, au ras de la tumeur, en tissu sain (préciser la marge minimale) ;

•   pTN (préciser l’année d’édition de la classification).

Le traitement chirurgical avec exérèse complète de la lésion est le traitement de référence.

Points clés

Carcinome basocellulaire

•   C’est le plus fréquent des cancers de la peau.

•   Son évolution est quasi exclusivement locale (métastases exceptionnelles).

•   Il survient en peau saine (photoexposée).

•   Le traitement de référence est l’exérèse chirurgicale.

Carcinome épidermoïde

•   Il est moins fréquent.

•   Il existe une possibilité de métastases ganglionnaires ou viscérales.

•   Il survient souvent en peau lésée (lésions précancéreuses : kératose actinique, carcinome épidermoïde in situ, leucoplasie).

•   Il peut toucher les muqueuses.

•   Les sous-types histologiques ont une valeur pronostique.

•   Le traitement de référence est l’exérèse chirurgicale.

•   Le compte rendu anatomopathologique de l’exérèse doit préciser la taille de la lésion, la présence ou non d’emboles vasculaires ou périnerveux, l’épaisseur tumorale sur coupe histologique (mesure en mm) qui ont également une valeur pronostique.

Mélanomes

I.   Prérequis

II.   Fréquence et épidémiologie

III.   Lésions précancéreuses et facteurs de risque de mélanome

IV.   Nævus

V.   Sous-types histologiques des mélanomes

VI.   Diagnostic d’une tumeur cutanée pigmentée

VII.   Prise en charge thérapeutique

I. Prérequis

Histologie de la peau normale (cf. figure 27.1).

II. Fréquence et épidémiologie

•    Incidence de dix nouveaux cas par an en France pour 100 000 habitants environ.

•    En constante augmentation dans les pays à population blanche.

III. Lésions précancéreuses et facteurs de risque de mélanome

La majorité des mélanomes surviennent de novo en peau apparemment saine. Le risque de transformation d’un nævus commun est faible. Il existe en revanche un risque plus élevé de transformation des nævus congénitaux de grande taille. Les facteurs de risque de nævus et de mélanome traduisent une plus forte exposition aux UV d’une part (facteur environnemental) et un terrain à risque de l’autre (facteurs individuels), incluant des facteurs de sensibilité aux UV :

•   coups de soleils avant l’âge de 15 ans ;

•   exposition solaire intense, intermittente ou chronique ;

•   phototype clair ;

•   antécédents personnels ou familiaux de mélanome : il existe des formes familiales de mélanome, dont les gènes en cause sont en partie identifiés (mutation inactivatrice de CDKN2A par exemple) ;

•   nombre élevé de nævus et en particulier syndrome de nævus atypiques.

IV. Nævus

Les nævus sont des lésions bénignes mélanocytaires et peuvent être congénitaux ou acquis.

A. Nævus communs acquis

Les nævus communs acquis (« grains de beauté ») sont les plus fréquents et ne posent en général pas de problème diagnostique, dès l’examen clinique. Ils apparaissent avant 50 ans, puis ont tendance à régresser. Sur le plan histologique, les nævus communs sont constitués de mélanocytes qui se groupent en amas (thèques) dans la couche basale de l’épiderme (nævus jonctionnels), ou le derme (nævus dermiques) (figure 29.5). Les nævus mixtes ou composés sont définis par la présence de thèques dans le derme et à la jonction dermoépidermique. L’architecture régulière, la présence de thèques et les caractéristiques des mélanocytes permettent de distinguer les nævus des mélanomes.

B. Nævus congénitaux

Ce sont des lésions malformatives qui peuvent parfois être géantes, pouvant recouvrir tout un membre ou une grande partie du tronc. Leur risque de transformation en mélanome augmente avec leur taille.

C. Autres types de nævus

Le groupe des nævus bleus (figure 29.6) est caractérisé par une prolifération de cellules mélanocytaires strictement intradermique et très pigmentée, renfermant d’importants dépôts de mélanine. D’autres nævus particuliers sont décrits : le nævus de Sutton ou « halo nævus » par exemple est un nævus commun entouré cliniquement d’une zone de dépigmentation en rapport avec une réaction inflammatoire lymphocytaire ciblant les mélanocytes (cellules du nævus et mélanocytes normaux avoisinants).

D. Nævus cliniquement atypiques

Il existe des nævus cliniquement atypiques. Il s’agit de lésions mélanocytaires qui ont certains critères « ABCDE » (cf. infra), posant le problème du diagnostic différentiel avec un mélanome débutant. Ces lésions doivent systématiquement faire l’objet d’une évaluation clinique par un dermatologue et si nécessaire d’une biopsie-exérèse pour étude anatomopathologique. Ils peuvent entrer dans le cadre d’un syndrome des nævus atypiques qui se définit par l’existence de plus de 50 nævus sur tout le corps avec un aspect clinique atypique (faisant craindre un mélanome). Les sujets présentant de telles lésions en grand nombre sont plus à risque de développer un mélanome.

V. Sous-types histologiques des mélanomes

Le mélanome est une tumeur maligne mélanocytaire.

Il existe différents sous-types anatomocliniques de mélanomes qui ont une valeur pronostique.

Les altérations moléculaires initiant le développement des tumeurs mélanocytaires intéressent toutes des partenaires de la signalisation de la voie des MAP-kinases, la plus fréquente étant celle de BRAF. Une mutation activatrice de BRAF (la mutation V600E dans la grande majorité des cas) est présente dans environ 50 % des mélanomes, plus particulièrement ceux développés en zone de photoexposition intermittente.

A. Mélanome superficiel extensif (superficial spreading melanoma [SSM])

C’est la forme la plus fréquente de mélanome (60-70 %). Il touche des adultes d’âge moyen en zone de photoexposition intermittente. La lésion évolue en deux phases : d’abord horizontale avec prolifération des mélanocytes dans l’épiderme, sans franchissement de la membrane basale, puis verticale où les cellules tumorales envahissent le derme progressivement, avec une évolutivité clinique plus rapide. Histologiquement, le contingent tumoral intra-épidermique envahit l’épiderme de façon anarchique (figure 29.7), et le contingent dermique, lorsqu’il existe, s’étend dans le derme sans présenter l’organisation régulière d’un nævus.

Au stade intra-épidermique (cancer in situ), l’exérèse est curative.

B. Mélanome nodulaire

Il représente 10 à 20 % des mélanomes. C’est la forme la plus agressive, d’emblée invasive. Elle est classiquement observée chez des adultes de plus de 60 ans, plus fréquemment chez les hommes, avec une lésion clinique rapidement évolutive, parfois achromique. Histologiquement, la lésion forme un nodule intradermique (figure 29.8), sans contingent tumoral épidermique, constitué des cellules mélanocytaires tumorales souvent clairement atypiques, avec des mitoses. La lésion est fréquemment ulcérée.

C. Mélanome acral lentigineux

Il représente moins de 5 % des mélanomes.

C’est un mélanome qui se localise sur les régions palmoplantaires ou l’appareil unguéal.

On le voit de façon plus fréquente que les autres chez les sujets à peau noire.

Histologiquement, la lésion forme une prolifération de mélanocytes atypiques d’abord intra-épidermique, où les cellules sont alignées dans la couche basale et/ou regroupées en thèques (figure 29.9), puis qui envahit le derme.

D. Mélanome de Dubreuilh

Il représente environ 10 % des cas. C’est la forme la moins rapidement évolutive, et qui reste longtemps in situ. Il s’agit d’une lésion localisée sur le visage, en zone photoexposée chronique (malaire, temporale), qui forme une plaque brune souvent étendue. On l’observe chez des sujets âgés, présentant par ailleurs des signes cliniques d’héliodermie.

Histologiquement, la lésion est constituée d’une prolifération de mélanocytes atypiques alignés dans la couche basale, associée à une atrophie de l’épiderme (figure 29.10). Avec le temps, se forment des regroupements en thèques, puis tardivement survient une invasion dermique.

VI. Diagnostic d’une tumeur cutanée pigmentée

A. Diagnostic clinique

De façon simple, pour une lésion pigmentée cutanée, un mélanome est suspecté d’autant plus que la lésion est de grande taille (> 6 mm), présente une asymétrie, des contours irréguliers, une polychromie, et qu’elle évolue (taille, coloration). Ces signes cliniques élémentaires sont facilement retenus par le moyen mnémotechnique suivant, appelé « items ABCDE » :

•   A : asymétrie ;

•   B : bords irréguliers ;

•   C : couleur inhomogène ;

•   D : diamètre > 6 mm ;

•   E : évolutivité.

L’examen clinique peut être aidé d’une analyse de la lésion par un dermatoscope, qui est une sorte de loupe appliquée directement sur la peau.

Remarque : l’analyse histologique n’est pas nécessaire pour les lésions ayant un aspect clinique caractéristique d’un nævus c’est-à-dire n’ayant aucun des critères ABCDE. Elle le devient dans les cas douteux ou pour confirmer un diagnostic de mélanome.

Certaines lésions sont retirées pour des raisons esthétiques ou fonctionnelles (lésions sur la zone de la bretelle du soutien-gorge, lésions de la barbe gênant le rasage, etc.). Par prudence, elles doivent systématiquement faire l’objet d’une analyse anatomopathologique. Toute lésion cutanée pigmentée n’est pas forcément mélanocytaire. Il existe des mélanomes achromiques (non pigmentés, de diagnostic clinique difficile). Il existe des mélanomes de localisation primitive autres que cutanées (mélanomes muqueux ou mélanomes œsophagiens, de la rétine, etc.).

B. Diagnostic anatomopathologique

L’analyse histologique a pour objectifs de :

1. faire le diagnostic de la lésion pigmentée : mélanome, nævus ou éventuellement autre lésion pigmentée ;

2. rechercher certains facteurs pronostiques, avec au premier plan la mesure de l’épaisseur maximale de la lésion (indice de Breslow ++).

1. Diagnostic de mélanome

Diagnostic de mélanome = exérèse complète avec examen anatomopathologique. Il est impératif de faire une exérèse de l’ensemble de la lésion, avec une petite marge de tissu sain (biopsie-exérèse) ++. Il ne faut jamais, sauf exception, faire une biopsie partielle, pour plusieurs raisons :

1. l’indice de Breslow et l’index mitotique ne peuvent pas être correctement évalués sur biopsie ;

2. le diagnostic différentiel entre nævus et mélanome est parfois difficile en histologie, et il n’existe pas de marqueur spécifique de mélanome à l’heure actuelle. Le diagnostic repose donc sur la morphologie. L’analyse de l’architecture globale de la lésion est un critère diagnostique essentiel ;

3. il existe, dans une proportion débattue de cas, des mélanomes sur nævus. Faire une biopsie partielle expose au risque dans ce cas de n’échantillonner que la partie bénigne de la lésion ;

4. en cas de biopsie partielle d’un nævus, la lésion se remanie ultérieurement et peut prendre un aspect très proche d’un mélanome, pouvant conduire ultérieurement à un diagnostic faussement positif de mélanome.

2. Analyse anatomopathologique et moléculaire de la tumeur

En cas de mélanome, l’examen histologique doit préciser les éléments suivants (recommandations INCa, 2011) :

•   type histologique : SSM, mélanome de Dubreuilh, mélanome acral lentigineux, mélanome nodulaire, autres ;

•   épaisseur en mm de la lésion = indice de Breslow (figure 29.11) ;

•   ulcération (non/oui) ;

•   index mitotique (nombre de mitoses par mm2) ;

•   exérèse complète (oui/non).

En cas de mélanome métastatique (métastases viscérales ou ganglionnaires), une recherche de mutation de BRAF doit être faite. L’ADN tumoral est en général extrait à partir du tissu fixé et inclus en paraffine restant dans les blocs tissulaires faits lors de l’exérèse de la tumeur et archivés au laboratoire d’anatomie pathologique. Le gold standard reste l’étude en biologie moléculaire (différentes techniques possibles, du séquençage classique aux techniques de séquençage de nouvelle génération), mais la mutation la plus fréquente (V600E) peut être détectée en immunohistochimie à l’aide d’un immunomarquage de cette forme mutée (V600E uniquement) de BRAF (figure 29.12).

VII. Prise en charge thérapeutique

La prise en charge des mélanomes doit être faite dans le cadre d’une RCP. Il est recommandé de faire une reprise du site tumoral après biopsie-exérèse. Cette marge latérale dépend de l’épaisseur de la tumeur et doit être faite au pourtour de la première zone d’exérèse :

•   mélanome in situ : 0,5 mm (sauf pour le mélanome de Dubreuilh cf. infra) ;

•   mélanome de 0,1-1 mm : 1 cm ;

•   mélanome de 1,1-2 mm : 1-2 cm ;

•   mélanome > 2 mm : 2 cm.

Pour les mélanomes de Dubreuilh, une marge de 1 cm est recommandée ; si cette marge ne peut pas être respectée pour des raisons anatomiques et fonctionnelles, une marge de 5 mm est acceptable sous couvert d’un contrôle histologique strict des berges. Concernant la profondeur d’exérèse, elle doit être faite jusqu’au fascia tout en le respectant. La reprise chirurgicale fait l’objet d’un examen anatomopathologique.

Points clés

•    Le mélanome est un cancer dont la fréquence est en augmentation.

•   Toutes les tumeurs pigmentées de la peau ne sont pas mélanocytaires.

•   La prise en charge d’une tumeur cutanée pigmentée suspecte repose sur la biopsie-exérèse avec examen anatomopathologique.

•   Le principal facteur pronostique des mélanomes est l’épaisseur (indice de Breslow), exprimée en millimètres et mesurée sur les coupes histologiques.

•   Les autres facteurs pronostiques sont le sous-type histologique, la présence ou non d’une ulcération et l’index mitotique.

•   La prise en charge repose sur la chirurgie, avec reprise d’exérèse dont les marges dépendent de l’épaisseur de la tumeur.

•   Le dépistage pour la prise en charge précoce du mélanome est important car l’exérèse d’une lésion au stade I (in situ) est curative.